Une soirée au poil !

Jeudi 15 octobre au soir, au Muséum d’histoire naturelle de Lille, c’était la fameuse Nuit du modèle à poils. Sortez vos crayons : Circonflex y était.

A 21h, la rue de Bruxelles est déjà bien sombre.  La porte d’entrée du muséum forme comme un halo de lumière qui nous invite à entrer. On pénètre dans l’établissement, et il est impossible de ne pas penser au film La Nuit au musée… Mais il y a un détail qui change tout : sous le squelette du grand rorqual qui nous domine, une table pleine d’outils de dessin  -crayons, supports, feuilles et gommes- nous accueille. Des petits groupes de visiteurs sont éparpillés entre les animaux naturalisés. Concentrés, assis par terre, des feuilles de papier sur les genoux, ils esquissent, croquent, dessinent avec application. Nous n’osons faire un bruit. Nous marchons sur la pointe des pieds. Nos yeux comparent les animaux colorés, immobiles dans leurs vitrines illuminées avec ceux, gris du noir des crayons, que ces artistes d’un soir couchent sur le papier.

 

“Je vais rester ici de 18h à 22h, j’ai pris ma soirée !”

 

Tanguy, communicant en entreprise, dessine occasionnellement mais pas autant qu’il le voudrait : « Cette soirée, c’était l’occasion de s’arrêter. D’observer les animaux. De les dessiner sous toutes les coutures. ». Il raconte que prendre le temps d’observer pour bien réaliser son dessin, c’est essentiel : « Je vais rester ici de 18 à 22h, j’ai pris ma soirée ! C’est exceptionnel de pouvoir se poser tranquillement dans un cadre aussi agréable ». C’est la première fois qu’il participe à l’événement, il en a pris connaissance sur Facebook. Et c’est vrai, l’événement a bien tourné sur les réseaux. Résultat : des dizaines de Lillois se sont retrouvés dans les entrailles du musée pour dessiner, comme Tanguy, « un mouflon, un rapace, plusieurs petites esquisses d’une girafe, un paresseux, une otarie… ».  Pour le jeune homme, c’est une chance d’être là et le contact avec la dessinatrice Marion Vandenbroucke l’a beaucoup inspiré : « C’était assez sympa d’avoir le point de vue d’une artiste, à la fois sur le dessin et sur son métier. ».

 

A poil !

 

 

On a tout de suite compris que Marion est une passionnée. Guide au musée pendant plusieurs années, elle connait l’endroit de fond en comble. « Quand la direction a eu l’idée d’organiser La nuit du modèle à poils, on m’a proposé de l’animer. Et depuis, chaque année, je participe à l’aventure. ». L’évènement est né il y a 5 ans, dans le cadre du Festival des pratiques artistiques amateurs, réservé aux adultes. C’est Sophie Di Nallo, responsable des relations avec le public,  qui en a eu l’idée : « On essaie de faire venir les gens par d’autre biais que l’attrait pour la science. Le dessin était un bon moyen, et puis les évènements qui se passent le soir marchent bien. Ça permet de voir le musée dans un autre cadre », explique Marion. Quant au nom, La nuit du modèle à poil c’est un clin d’œil à La nuit du modèle vivant, organisée aussi par le Palais des beaux-arts, et où les modèles sont réellement …à poil !

 

Persévérer

 

 

Il n’y a pas d’âge pour aimer dessiner. Dans les allées, les plus jeunes côtoient les plus âgés.  Et bien sur, on ne trouve pas que des pros. On croise  aussi des curieux qui viennent ici pour accompagner des amis. Ils se laissent tenter, prennent un crayon, osent quelques traits et souvent, Marion le constate,  « il y a des choses bien qui ressortent ! ». L’ancienne dessinatrice pour la jeunesse a pour habitude de donner aux néophytes trois conseils, essentiels pour réussir son dessin : prendre son temps. Ne pas se mettre la pression. Et bien sur, persévérer. Nous rencontrons trois amis qui se sont encouragés mutuellement à tenter l’expérience. L’initiateur de l’idée les a motivés par un petit « Allez, on va dessiner un peu ! ». Marion avait raison : leur croquis ont plutôt de la gueule ! Mais les artistes d’un soir sont modestes: « J’aime bien dessiner, reconnaît l’un deux, mais je trouve que mon dessin n’est pas terrible par rapport au niveau général des gens qui viennent ici. ».

La soirée avance, le musée est moins silencieux, il apprivoise ses visiteurs. L’ambiance est différente, entre chill et découverte. « On n’est pas venus seulement pour visiter, mais aussi pour discuter et passer du bon temps autour d’un dessin ». Pour nos trois amis, pas d’excuse, il faut profiter de la culture à Lille avant que tout ferme de nouveau.

 

“Aujourd’hui seulement 5% des collections sont exposées”

 

Malgré un couvre-feu compromettant pour la Culture, Le Palais des Beaux Arts  ne devrait pas trop pâtir des mesures sanitaires : il était de toutes les façons en travaux jusqu’en février. Le musée s’agrandit pour pouvoir accueillir plus d’œuvres. « Aujourd’hui, regrette Marion, seulement 5% des collections sont exposées. »

En attendant, restez à l’affut pour connaître les prochaines dates et programmations du musée. Et patience : La Nuit du modèle à poils revient l’année prochaine.

 

Rosemitha Pimont, Célestin de Séguier