Si c’est pas interdit, c’est autorisé ?

« Quand le gouvernement dit non au carnaval, les Dunkerquois disent oui », résume un jeune carnavaleux rencontré lors de la bande de Dunkerque. Plus souple que les années précédentes, le maire de Dunkerque, Patrice Vergriete, a pour cette édition 2022 laissé le libre arbitre aux Dunkerquois : carnaval annulé, déconseillé, mais pas interdit. Notre Dunkerquoise de Circonflex Mag a enfilé son Clet’che pour prendre la température de cette bande annulée.

Ce dimanche 27 février, à l’aube des Trois Joyeuses, chacun se dirige place Jean Bart, persuadé de vivre un carnaval différent des autres années. Les festivités ne sont pas organisées par la ville, personne ne sait à quoi s’attendre. Grande est alors la surprise de découvrir, sous un soleil étincelant, une marée de chapeaux colorés presque aussi importante que d’habitude. « C’est inattendu et c’est ça qui est beau. C’est la force de la coutume ! », s’exclame Jérôme, un fidèle de la saison carnavalesque. L’engouement est le même : musique festive, costumes toujours aussi soignés, bière bien fraîche. Mais les rires, eux, résonnent encore plus fort.

« Le carnaval c’est l’antidépresseur dunkerquois »

Sans surprise, la bande annulée a malgré elle réussi à rassembler près de 15.000 carnavaleux. David, un musicien qui pratique le tambour depuis son plus jeune âge, résume joyeusement la situation :  « Un bordel. C’est le bordel parce que c’est annulé et qu’il n’y a rien du tout de prévu. Et puis en fait, tout le monde est là. ». C’est un mot qu’on a beaucoup entendu au fil de la journée : le bordel. Cependant, dans cette désorganisation, l’autonomie et le savoir-faire des Dunkerquois ont été magistraux !  « C’est moins organisé, mais c’est marrant aussi que ça se fasse indépendamment des organismes », explique Timothée, 18 ans.

Alors certes, la bande a subi quelques changements inévitables : pas de jeté de harengs sur la place de l’Hôtel de Ville pour cette édition 2022. Mais tout à la joie de se retrouver, les Dunkerquois étaient prêts à quelques concessions pour enfiler de nouveau leur masquelour. « Ça fait trois ans que je n’ai pas fait le carnaval, ça me fait un bien incroyable. On retrouve les racines, les gens. Le carnaval, c’est l’antidépresseur dunkerquois », témoigne Paul, 23 ans, le sourire jusqu’aux oreilles.

 « Le carnaval c’est l’appartenance à un groupe »

Si du côté des carnavaleux, la journée se déroule à merveille, les forces de l’ordre ont rencontré quelques difficultés : la bande n’étant pas organisée officiellement, aucun itinéraire n’a été aménagé. « On doit s’adapter et être partout pour intervenir en cas de besoin », témoigne un policier présent sur la place Jean Bart.

En plus d’être une période de festivités, le carnaval de Dunkerque est un élément phare de l’identité dunkerquoise. Philippe, 63 ans, connu sous le nom de Yvan Mort-Au-Medef par ses confrères carnavaleux, voit cette tradition comme un ciment social. « C’est comme ça qu’on cimente une société locale », explique-t-il. Valeria, qui vit à la rue depuis plusieurs années, nous a confirmé que le carnaval est bien plus que de la bière, des chapeaux et des chansons. « Aujourd’hui, sans mon clet’che je me sens pas carnavaleuse. Au-delà du déguisement, le carnaval, c’est l’appartenance à un groupe»,  explique-t-elle avec nostalgie. Tous vous le diront, les déguisements effacent les classes sociales, le carnaval, c’est un élan de fraternité entre les Dunkerquois.

Ce dimanche 27 février, dans la bonne humeur, tous ont quitté le rigodon de la place Jean Bart « joyeux comme des cigales ». On en attend autant pour la bande de Malo-les-Bains dimanche prochain !