Après quatre années de stabilité, le prix des cigarettes a augmenté de 30 centimes lundi dernier, en plein Mois Sans Tabac. Avec le flop du paquet neutre, l’Etat cherche une nouvelle solution pour réduire la consommation de tabac. Mais comme d’habitude, cette hausse du prix du paquet suscite bien des grognes…
C’est un nouveau coup pour les buralistes. La hausse des taxes sur les paquets de cigarettes passe mal. Surtout dans les régions frontalières. Si les fumeurs du centre de la France n’ont pas de réelles alternatives, au bar-tabac Le Saint-Claude à Wattignies, les gérants Béatrice et Pierre Pontus ne voient pas les choses de la même façon. « On est à 20 minutes de la Belgique. Nos clients ne vont pas se gêner pour passer la frontière et payer moins cher leurs paquets », explique Béatrice. Remontée, la buraliste enchaine : « Même problème dans le sud de la France avec l’Espagne. Et puis, ne nous faisons pas d’illusions, les marchés parallèles et illégaux vont se développer. Il y en a déjà un peu ici. Certains ne s’embêtent même pas et font ça juste devant, sur le trottoir. J’espère que l’Etat va mieux contrôler ce genre de commerce. J’ai assisté à un congrès, il y a quelque temps. On y évoquait la possibilité de réduire le nombre de cartouches que l’on peut ramener des pays étrangers. ».
Le gouvernement est en train de casser notre métier.
Pierre enchaîne « C’est encore les classes moyennes qui vont souffrir de cette augmentation. Tous les consommateurs n’ont pas les moyens d’aller acheter des cigarettes ailleurs. Il aurait fallu uniformiser le prix des paquets en Europe. Ça éviterait de pénaliser le marché français. Le gouvernement est en train de casser notre métier. ».
Se basant sur son expérience de buraliste, Béatrice en est certaine, « ces augmentations progressives ne seront pas efficaces pour réduire la consommation des fumeurs. Comme le paquet neutre. Au final, ça n’a rien fait. Peut-être que pendant deux ou trois jours, on verra un peu moins de monde. Les gens se plaindront aussi. Mais c’est temporaire. Ils ne ne fumeront pas moins, mais trouveront des solutions. Certains s’arrangeront avec des amis pour organiser des voyages en Belgique, par exemple. Quand on habite dans la région lilloise, c’est facile ».
Les gérants du Saint-Claude pensent déjà à des alternatives au tabac classique, comme le détaille Pierre Pontus : « On s’est mis aux cigarettes électroniques et aux chichas. Il y a un véritable effet de mode sur ces produits. Sans compter que les fumeurs se soucient évidemment de leur santé. Ces deux produits sont moins nocifs que les cigarettes classiques. »
Je trouve même ça dégueulasse.
Et qu’en pensent les étudiants ? Disposant d’un budget souvent limité, ils sont nombreux à devoir compiler travail et études. Cette nouvelle hausse du prix du tabac n’est donc pas très bien accueillie. Benjamin, étudiant en Histoire et fumeur de tabac à rouler, n’est pas directement concerné par ces nouvelles taxes sur les paquets. Et pourtant, il a un avis bien tranché sur la question. « Je pense que cette taxe est une bonne idée en soi. Pas pour réduire la consommation, mais plutôt pour couvrir la hausse des frais de santé engendrée par la nocivité du tabac. Mais c’est hypocrite de vendre ça comme le moyen de réduire le nombre de fumeurs. ». Il continue, assez remonté « Je trouve même ça dégueulasse. Comme toutes les taxes, celle-ci est égalitaire et non-équitable. Que le consommateur gagne un SMIC ou dix fois plus, il va devoir subir la même augmentation du prix du paquet ».
Manon, une étudiante en communication, a également un avis mitigé sur la question. « Je ne pense pas que l’Etat veuille réellement diminuer la consommation de cigarettes. Toutes les études l’ont démontré : si le prix n’augmente pas radicalement, les gens s’adaptent. C’est un moyen pour l’Etat de se faire un peu plus d’argent sur le dos des dépendants. Pour ma part, je fume une ou deux clopes par jour, ça ne va pas vraiment changer grand-chose ».
« Je suis pour l’augmentation du prix des cigarettes. Je fume 10 à 12 clopes par jour, des Pueblo classic, explique Marie-Laurence, une fumeuse de longue haleine. Fumer, c’est notre choix, mais aussi notre erreur. Et je ne trouve pas normal que les non-fumeurs prennent en charge la santé des fumeurs. Je ne sais pas si cette mesure sera efficace. Mais personnellement, ça va certainement me motiver pour diminuer ma consommation…et peut-être, qui sait, arrêter de fumer ! »
Cette première augmentation n’est qu’une étape de l’objectif final du Ministère de la Santé. Une seconde hausse de un euro est prévue en mars 2018. En 2020, le paquet de cigarettes devrait couter dix euro. Cette majoration se fera progressivement, sur les trois ans à venir. Après ces multiples hausses, le prix d’un paquet de cigarette aura augmenté de 50% en 2020. Philip Morris, la deuxième marque de cigarettes la plus vendue, a préféré réduire ses marges. Résultat : son paquet a augmenté seulement de 10 centimes. A contrario, les cigarettes News et Winston passent de 6,50€ à 7€.