violence faite aux femmes
violence faite aux femmes

« C’était la seule chose que je méritais »

A l’occasion de la Journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes, Circonflex publie le témoignage d’une jeune femme qui a subi des violences tant physiques que psychologiques de la part de son ex petit-ami.

Pour des raisons évidentes de confidentialité, les prénoms des personnes citées ci-dessous sont anonymisés.

Je m’appelle Marie, j’ai 19 ans et j’ai été victime d’une agression orchestrée par mon ex qui a failli me couter la vie. Voici mon histoire.

En troisième, j’ai rencontré un garçon qui s’appelle Enzo, un adolescent déjà connu de la justice. Très vite nous nous sommes rapprochés, et sans tarder il a commencé à être violent avec moi, tant sur le plan physique que psychologique.

Mensonges de son côté, dépendance de ma part.

Durant la fin de mes années de collège, j’ai fait beaucoup de soirées chez moi, avec Enzo et ses copains, que je considérais comme les miens. Pendant l’une de ces soirées, dans la nuit du 28 au 29 octobre 2020, Enzo a orchestré un cambriolage avec l’aide de ses amis. Au milieu de la fête, j’ai remarqué 3 personnes qui sont sorties de chez moi avec le coffre-fort, la console, tous les objets de valeurs.  J’ai crié : « mais qu’est-ce que vous foutez avec mes affaires ? ». Résultat : 2 clavicules, le poignet, la cheville, le genou, le coude cassés, des cocards et l’obligation de me déplacer en fauteuil roulant pendant 1 mois. Au procès, les agresseurs ont avoué avoir voulu me tuer pour que je ne puisse pas les dénoncer. Un jugement a été rendu un an et demi après le drame, Enzo a pris 9 ans de prison avec sursis et 1 000 euros d’amende. Pendant 1 an, il avait interdiction de s’approcher à moins d’1 kilomètre de ma maison. Seule une personne présente lors de la soirée a pris de la prison ferme.

Le plus dur a été de me dire que tout ça avait été orchestré par la personne dont j’étais follement amoureuse. Enfin, je croyais que c’était de l’amour. Ce n’était que de l’emprise, de la manipulation, je m’en suis rendue compte bien après. J’étais persuadé qu’on vivait l’amour avec un grand A et que c’était juste un garçon perdu qui devait être sauvé. J’ai préféré fermer les yeux sur le fait que notre relation n’était basée que sur du mensonge de son côté et de la dépendance de ma part.

Au début, c‘est tout beau tout rose

Durant notre relation, il m’a violenté physiquement mais aussi psychologiquement. Au début, c’est tout beau, tout rose. Petit à petit, Enzo m’a éloigné de ma famille, il m’a fait faire des choses qui ne me ressemblaient absolument pas, très loin de mes valeurs. Puis au fur et à mesure, quand il ne se sentait pas bien, il me frappait une fois, deux fois, mais après il s’excusait et me disait qu’il ne recommencerait plus jamais. C’est comme ça que je suis tombée dans un cercle vicieux. Mais pour moi, la pire des violences reste la violence psychologique, tu y repenses sans cesse. C’est compliqué à expliquer quand on ne l’a pas vécue : parfois les mots font plus mal que les actes. Par exemple, le chantage était au centre de notre relation, concernant des photos intimes, les relations sexuelles. Le chantage, c’était son truc préféré et psychologiquement ça m’a détruit à petit feu.

J’ai été abusée par mon oncle par alliance

Je pense que je suis tombée dans cette relation car depuis mon plus jeune âge, j’ai eu des mauvaises expériences avec les hommes. Durant mon enfance, j’ai eu un beau père très violent psychologiquement et j’ai été abusée par mon oncle par alliance pendant environ 5 ou 6 ans quand j’avais 10 ans. Depuis petite, je n’ai connu que de la violence avec les hommes. Donc, je me suis dit que je n’attirais que les mauvaises personnes et que c’était la seule chose que je méritais.

Aujourd’hui, c’est encore difficile. Mais maintenant grâce à mes amis et ma famille proche, qui elle aussi a subi un choc, je vais mieux.  Ce traumatisme fait partie de mon histoire, de ma vie et j’apprends de jour en jour à vivre avec. Et je pense que si on oublie, le risque est de retomber dans des relations toxiques du même type.

Chaque acte doit être dénoncé

A toute personne qui vivrait une relation comme la mienne, je voudrais dire que le plus important, c’est d’en parler. Et surtout de ne pas minimiser les choses. On se dit toutes qu’on partira à la première gifle, à la première insulte. En vrai, on ne le fait pas. Chaque acte doit être dénoncé. Même si la justice ne fait pas toujours correctement son travail, il faut aller porter plainte. Dès lors qu’une personne est violente avec quelqu’un, elle le sera avec tout le monde.

Actuellement je fais des études de droit et de sciences politiques. Plus tard, je voudrais travailler sur la délinquance des mineurs. M’occuper d’enfants et d’adolescents qui n’ont pas la chance de pouvoir évoluer dans de bonnes conditions, et qui sombrent dans la délinquance. Pour qu’aucune fille ne subisse les horreurs que j’ai endurées.

Pour rappel, le 3919 est le numéro à appeler si vous êtes victime ou témoin de violences conjugales. Ce numéro peut sauver des vies.

 

Auteure : Manon Bello