Professeur d’art plastique au collège Maxence Van der Meersch à Mouvaux, peintre et photographe à ses heures perdues, Guillaume Romero est un homme engagé. Aujourd’hui, c’est pour un acte de solidarité qu’il prend ses pinceaux.
Son petit salon lui sert d’atelier d’artiste. Guillaume y a installé une dizaine de toiles, son chevalet et ses pinceaux. Depuis deux semaines, l’artiste lillois à l’accent chantant s’est lancé un défi : peindre la guerre en Ukraine.
Quand il se raconte, Guillaume ne manque pas d’évoquer son adolescence perpignanaise. C’est la que son goût pour la peinture s’est éveillé après un épisode douloureux : sa maison familiale a été saisie pour raisons financières. Ce jour là, il a changé de milieu. Il a découvert la précarité, les difficultés de la vie quotidienne. Mais il a aussi développé une fascination pour les maisons et a commencé à les dessiner sans s’arrêter. Depuis, son domaine de représentation s’est élargi. Il se souvient que cette période de sa vie a également été impactée par les images choquantes de la guerre du Kosovo. Elles l’ont marqué et lui sont restées en mémoire des années durant. Depuis le début de la guerre en Ukraine, ses souvenirs sont remontés. Et le professeur a décidé de s’engager à sa manière. Avec sa peinture. Avec son talent.
Tous les tableau de Guillaume, ceux de sa série sur l’Ukraine comme les autres, ont une particularité. Ils relèvent de la technique du clair-obscur, reflet de l’attrait de l’artiste pour la nuit et la lumière, que l’on retrouve aussi dans ses photographies, « A la nuit tombée, nous portons un tout autre regard sur le monde, tout y est plus poétique, » explique t-il.
« Mon objectif c’est de laisser une trace plus pérenne que celle de ces images médiatisées surabondantes »
A priori, l’art et la guerre ne font pas bon ménage. Guillaume n’est pas de cet avis. Parce que peindre est le seul moyen pour lui de s’investir, de trouver sa place dans ce conflit. Au contraire des images télévisées, qui passent et disparaissent, la peinture exige une temporalité différente.On la contemple, on l’admire, on la regarde. « Mon objectif, c’est de laisser une trace plus pérenne que celle de ces images médiatisées, surabondantes, que l’on voit sans pour autant les regarder. Au contraire, les tableaux attirent l’œil et poussent à la réflexion. Avec mes toiles, je veux crier : « regardez ce qu’il se passe, c’est l’histoire qui se répète encore ». Elles me permettent aussi d’exprimer mes angoisses, celles que l’on partage tous ».
Pour l’instant, la série sur l’Ukraine réunit quatre toiles. Elles montrent la guerre telle que l’artiste la ressent. Ce sont des histoires de vie, d’hommes, de femmes, d’enfants que Guillaume raconte. Dans La fuite en train, il s’est inspiré d’une photo trouvée sur les réseaux sociaux, qu’il a reprise en y ajoutant sa touche personnelle. Le jeune garçon tout à gauche de la toile n’a pas été peint par hasard. On le connait tous. Il s’agit du petit Ukrainien de 11 ans , qui a fuit la guerre en traversant seul, avec son sac à dos, la frontière ukrainienne pour se réfugier en Slovaquie. Un acte courageux, dont ont parlé tous les médias, et que le peintre a souhaité mettre en lumière.
« J’enseigne à mes élèves les valeurs de la citoyenneté à travers l’art»
Guillaume parle de la guerre à ses élèves. Avec le professeur d’histoire-géographie, il a organisé au sein du collège une exposition sur ce thème. Celle-ci montre que la création est une forme d’engagement, qu’elle peut mener à la dénonciation ou à la solidarité: « je veux enseigner à mes élèves les valeurs de la citoyenneté à travers l’art ». Le peintre explique qu’il va proposer sa série de toiles à la Fondation de Lille, association d’utilité publique venant notamment en aide aux réfugiés de guerre dans la région. Et comme l’association a répondu très favorablement à son offre, Guillaume ne compte pas s’arrêter à sa quatrième toile …