dessin palais de justice
dessin palais de justice

29 janvier 2025- Une matinée au Palais de Justice de Lille.

-8h45 : Devant le tribunal on observe des hommes, dossier à la main qui sortent presque en courant, des cinquantenaires, cigarettes à la bouche qui semblent habitués. Une jeune fille en larme et des agents pénitenciers, arme à la taille, pour qui la journée semble avoir commencé depuis plusieurs heures déjà.

Dans les couloirs il y a l’avocat taquin qui dit « À bientôt » à son client en lui serrant la main et il y a les femmes moins taquines, hématomes au visage et enfants au bout du bras.

Au premier étage, une gigantesque tapisserie, pour le moins originale, surplombe les banquettes en cuir bordeaux de la salle d’audience C, une pièce sombre et vide.

« Ça va, on peut bien péter un plomb de temps en temps. »,

-9h15 : Un homme se tient debout face au juge, il s’agit d’un fonctionnaire de police accusé d’avoir agressé à plusieurs reprises, différents individus lorsqu’il était en état d’ivresse. Il a fait le choix de ne pas avoir d’avocat pour le défendre, les deux victimes assises derrière lui le regardent à peine.

Cicatrice sous l’œil droit, il prend un air boudeur lorsqu’on lui annonce sa sanction, un sursis probatoire de 2 ans, un suivi psychologique et toxicologique pour traiter son alcoolisme.  Et  à en juger par le dégout sur son visage, le pire de tout, l’interdiction du port d’arme.

Les victimes se lèvent et disparaissent en un claquement de doigt. L’homme, quant à lui ,repart irrité, il n’a pas l’air de comprendre sa condamnation.

palais de justice

« Chacun mérite une défense. »

-9h40 : Violence sur conjoint. L’accusé se présente à la barre, un homme en veste de cuir, la soixantaine, écharpe verte et lunettes autour du cou. Son avocat ne s’étant pas présenté, l’audience est repoussée, pas pour demain, non, pour janvier 2026. L’air satisfait, l’homme au rictus retourne s’assoir et reste jusqu’à la fin de la matinée dans la grande salle froide et silencieuse.

-9h58 : Le juge qui préside l’audience semble agacé, aucun des accusés suivant ne se présente à la barre.

« Papa à fait bam, le fusil, il le cache pour faire du mal aux gens. »

-10h : Un homme inculpé à la suite de violences sur sa compagne et leur fils. Les faits datent de 2021, l’homme de 25 ans aurait frappé sa femme et jeté de l’huile alimentaire sur elle et l’enfant en poussette avant d’essayer de kidnapper le petit d’un an à peine. On parle d’un « papa qui a du mal à gérer ses émotions », le magistrat lève les yeux au ciel.

Le verdict est donné, l’homme est déclaré coupable, il devra verser 4000 € à la victime, se tenir à distance de cette dernière pour les deux prochaines années et effectuer une peine de 4 mois d’emprisonnement.

La seule présente, l’avocate de la victime, quitte immédiatement la salle, sourire aux lèvres et téléphone en main.

 

Se suivent des cas de vol à l’étalage, d’agression aux tessons de verre, de dégradation de voiture, et enfin faute d’individus s’étant présentés, à 10h30, la séance est levée.

Les greffiers, magistrats, avocats et juges se serrent la main, se disent à plus tard. Pour certains d’entre eux, la journée et les horreurs sont loin d’être finis. Pour d’autres, la journée sera calme, en attendant les prochains drames.