Ce mardi 8 octobre à Lille a eu lieu l’avant-première du film Norah. Tawfik Alzaidi, le réalisateur présent sur place, transporte les téléspectateurs en Arabie Saoudite dans les années 90. Pays où l’expression artistique et les droits des femmes sont limités.
Silence dans la salle. Pour l’instant, l’écran est noir. Arrive la musique, un air de guitare. On entend des bruits de grains de sable qui tombent. La voix suave d’une femme s’élève. Et soudain, un vaste paysage de montagne, qui s’étend à perte de vue.
Le personnage principal du film de Tawfik Alzaidi, c’est elle, Norah, qui aimerait pouvoir aller à l’école. Déjà promise à un homme de son voisinage, il lui est interdit de parler à la gent masculine. Elle va faire la rencontre du professeur de son village, Nader. Tout deux, au péril de leur vie, vont développer une connexion délicate et secrète. Il l’instruit sur le monde extérieur, si différent de la vie qu’elle mène. Norah refuse d’être mariée de force et décide de fuir son village pour connaître la liberté.
« Nous devons passer un concours »
En 2019, alors que les salles de cinéma viennent tout juste de faire leur réapparition en Arabie Saoudite, Tawfik Alzaidi terminait l’écriture du script de son film. Toutefois, entre la conception et la réalisation, il lui a fallu surmonter bien des obstacles. « En Arabie Saoudite, il y a un processus à suivre avant d’obtenir la permission de créer ou de publier une œuvre. Nous devons d’abord passer un concours pour avoir accès à des financements. Ensuite, il y a une négociation pour déterminer dans quel pays nous avons le droit de diffuser le film ». Quatre ans auront été nécessaires pour que le film voit le jour en Arabie Saoudite. Un an supplémentaire pour qu’il soit projeté en Europe. Cela témoigne des difficultés d’exportation d’œuvres cinématographique saoudiennes à l’international.
Des limites à ne pas franchir
Le tournage d’un film en Arabie Saoudite soulève également des questions concernant les limites artistiques. Le réalisateur confie : « nous n’avons pas réellement de règles strictes à respecter pour tourner, mais nous savons qu’il y a des limites à ne pas franchir. Par exemple, sur le choix des actrices qui apparaissent sans voile : ne peuvent tourner que des femmes habituées à jouer ce genre de scène. ».
Le film dénonce des sujets délicats comme le mariage forcé et l’accès restreint à l’éducation pour les femmes. Le réalisateur reconnaît que cette audace n’a pas été bien perçu par tout le monde :« Le film n’a pas plu à tout le monde. Notamment à ceux qui vivent dans des villages isolés, comme le personnage de Norah. Les pratiques dénoncées sont encore une réalité pour eux. »
Fin de la projection. Un silence lourd règne dans la salle. Témoin de l’émotion et de la gratitude envers l’artiste ,qui a su révéler la réalité de la liberté d’expression restreinte dans son pays.