Quel est le lien entre la victoire du Sénégal à la Coupe Africaine des Nations et les Hauts-de-France ? Régis Bogaert. Entraîneur adjoint des Lions de la Teranga le jour et père de famille faches-thumesnilois le soir, c’est la vie que mène notre portrait de la semaine.
6 février 2022. Régis Bogaert, ch’ti soixantenaire, est vainqueur de la CAN. Cela fait 6 ans qu’il est adjoint d’Aliou Cissé, le sélectionneur sénégalais. Et toute sa vie, le Nordiste se souviendra des festivités qui ont suivi. “Le retour à Dakar était inimaginable. Plus de 2 millions de personnes dans les rues nous acclamaient. Nous avons même été reçus par le président sénégalais, Macky Sall.” se souvient-il. “Il nous a expliqué que nous avions redonné de la joie, du lien social et de la force à tout un pays”.
« Si je ne peux pas être un grand joueur, je serai un grand entraineur »
Et pourtant, rien ne destinait Régis Bogaert à se retrouver sur le toit de l’Afrique. Déjà, quelques années en arrière, c’est sa force de caractère qui lui avait permis de faire carrière dans le foot. Une rupture des ligaments croisés brise son rêve d’être joueur pro. Mais Régis n’a pas baissé les bras : “Si je ne peux pas être un grand joueur, alors je serai un grand entraîneur”. Et c’est ce qu’il a fait dès ses 17 ans. Après quelques piges dans des clubs du Nord, il se retrouve une première fois à la tête de celui du Sénégal entre 2012 et 2014. Il revient dans sa région natale, à Feignies, mais est rappelé au Sénégal pour être le bras droit du sélectionneur, Aliou Cissé, en 2016.
« Je lui ai dit : attends, j’arrive ! »
Régis Bogaert et Aliou Cissé, c’est une histoire qui dure depuis longtemps. À 14 ans, le joueur sénégalais entre au centre de formation de Lille, où travaillait Régis. “Je m’occupais de lui à la fois sur le terrain, à la fois dans son intégration dans la région, comme à l’école par exemple”.
Des années plus tard, Aliou Cissé devient entraîneur. Régis reçoit un coup de téléphone. “ Aliou me dit de venir le rejoindre à Dakar. Il voulait que je sois son second sur un match de qualification pour les Jeux Olympiques. Si on le gagnait, on irait faire les JO ensemble avec l’équipe du Sénégal. Je lui ai dit : attends, j’arrive ! ”
Un choix payant. 6 ans plus tard, le Faches-Thumesnilois est champion du continent africain. Le seul regret de Régis Bogaert, c’est que ce succès n’arrive que maintenant, à 60 ans.
Un entraineur blanc qu’on ne connait même pas
Diriger une sélection d’un pays que l’on ne connaît pas n’est pas chose aisée. Lorsque Régis est choisi pour coacher l’équipe nationale du Sénégal, il doit faire face à de nombreuses critiques. “Au début, les gens se demandaient : Pourquoi la fédération sénégalaise nomme un entraîneur blanc pour diriger notre équipe, alors qu’on ne le connait même pas ? ”. Les enjeux et la pression étaient élevés. “Si je suis encore là, ce n’est pas pour mes beaux yeux, mais parce que j’ai toujours atteint les objectifs demandés.” Et gagner la CAN a fait taire les derniers sceptiques.
Cette mixité est devenue un atout
Aujourd’hui, le Nordiste s’est adapté à la culture sénégalaise, qu’il a découvert sur le tard. “Ce que je vis au Sénégal, avec mes yeux d’Européen, est impressionnant et extrêmement formateur”. Cette mixité est devenue un atout sur de nombreux points : la gestion, l’organisation, le coaching…
Celui qui est aussi préparateur mental en a fait une force dans son management : “Quand tu changes de culture, tu ne vas évidemment pas oublier ta formation. Mais tu ne dois pas considérer que ton référentiel est le meilleur”. Et découvrir la culture de ses coéquipiers n’était pas chose aisée. “Même si je ne parle pas le wolof – langue nationale sénégalaise – j’ai fait en sorte de comprendre leur style de vie, leur croyance religieuse, leur perception du monde”.
Aujourd’hui, l’histoire continue de s’écrire. Le 29 mars, les Lions se sont qualifiés pour le Mondial 2022 au Qatar, et joueront même le match d’ouverture. Nouvel objectif pour le coach : faire un beau parcours là-bas.