« Je dessine quelqu’un nu », une expérience totalement folle.

Depuis plusieurs années, la Nuit du Modèle Vivant est organisée dans plusieurs villes de France. Cet événement réservé aux étudiants offre la possibilité de découvrir le modèle vivant. Volumes, ombres, lumières ou proportion, le dessin nu est considéré comme l’aboutissement de l’apprentissage artistique. Avoir un modèle déshabillé face à soi est peut-être une habitude pour les artistes. Mais pas pour tous, et c’est mon cas. J’ai tenté l’aventure au Palais des Beaux-Arts de Lille pour Circonflex Mag. Résumé de ma soirée.

18h :
J’arrive devant le Palais des Beaux-Arts. Il y a déjà la queue. Je m’installe dans la file alors que la nuit est déjà tombée. Il fait froid, mes dents s’entrechoquent et mes idées se bousculent. Je vais vraiment dessiner une personne nue ? Mais qu’est ce que je fais là ? Qui va être mon modèle ? Est-ce que je vais réussir ?

18h40 :
Après plusieurs dizaines de minutes d’attente et d’interrogations, les portes s’ouvrent enfin. Je passe la sécurité et je pose mes affaires au vestiaire. Le stress monte petit à petit, l’heure de l’atelier approche.

19h :
A peine arrivée, je balaie la salle du regard et remarque qu’il reste peu de places assises. Je m’avance vers les dernières chaises libres. Mais mon regard est attiré par un homme d’une quarantaine d’années en peignoir au milieu de tous ces étudiants. « Qui est-il ? » me vient d’abord à l’esprit. Il tient en équilibre, une balle sur son poing. Une intervenante m’interpelle : « Il est fort ». Je lui adresse un sourire timide. « Il tient cette balle en équilibre depuis près d’une heure, il a même descendu les escaliers alors qu’elle était sur sa tête. » Je suis vraiment étonnée… et cette prof de dessin, qui semble bien le connaître, explique qu’il est artiste de cirque. Je comprends alors que cet homme mystérieux est modèle pour la soirée, et j’en suis ravie.
Quelques secondes se sont écoulées depuis le début de la conversation. Je me rends compte que l’atelier va bientôt commencer et que je suis toujours au milieu de la salle . Je me dépêche alors de rejoindre enfin une place.

19h04 :
On nous briefe rapidement. Certains sont déjà prêts dans la salle. Mais moi qui ne sais faire que des bonhommes bâtons, je me demande un peu ce que je fais là, entourée d’étudiants en art qui risquent de me critiquer ou se moquer de moi.

19h10 :
Les modèles se mettent en place, dans tous les sens du terme. Et c’est parti pour 1h de dessin. Et si je suis plutôt à l’aise avec la nudité, les premières minutes sont… pour le moins intimidantes. Je ne sais plus si ce sont les modèles ou mes voisins de travail pour la soirée qui occupent le plus mon esprit.
Au fil du temps, je suis de plus en plus à l’aise. Je trouve mes dessins de moins en moins moches. Le modèle fait des blagues. Ma voisine de gauche me fait même des compliments ! On sympathise, on échange sur nos vies. Elle vient de Turquie et étudie les lettres modernes à Lille depuis deux mois. Je suis plus à l’aise, Ozge Kahriman est devenue une copine en peu de temps.

20h :
Comme à un examen, on baisse les crayons, le temps est écoulé. Et pour une dessinatrice débutante, après plusieurs essais et quelques conseils, je trouve que je m’en suis pas si mal sortie. Dessiner un modèle vivant qui change de pose toutes les 5 minutes n’est vraiment pas facile. Je vous défie de faire mieux que moi !