À l’occasion de la projection de son nouveau film documentaire Chasser les dragons au musée des Beaux-Arts de Lille, le 18 novembre, la réalisatrice Alexandra Kandy Longuet nous a expliqué son expérience de tournage dans une salle de consommation à moindre risque à Liège.
Le 25 octobre, Gerald Darmanin et le gouvernement ont bloqué l’ouverture d’une première salle de consommation à moindre risque dans la ville de Lille. Hasard du calendrier : le Centre international pour les arts vidéo, Heure exquise a sélectionné, dans le cadre du mois du documentaire, le film d’Alexandra Longuet: un huis clos thérapeutique, qui se déroule dans une salle de consommation à Liège, ville touchée par le trafic et la consommation d’héroïne.
Chasser les dragons* est le fruit d’une rencontre : celle de l’appel à projet encadré par la société de production Dérives et l’intérêt d’Alexandra Longuet pour réaliser un film humaniste sur l’assuétude aux drogues. Le film retrace le projet d’une salle de consommation, et a pour ambition de rendre son humanité à chaque consommateur, doté d’une histoire émouvante. La réalisatrice a eu à cœur de donner à voir à son public des choses qu’on ne verrait pas sans son travail.
« On considère les consommateurs comme des citoyens de seconde zone »
La caméra se rapproche, et la réalisatrice met en scène la prise de parole de consommateurs en marge de la société. Pour elle, c’est important de les écouter : « On considère les consommateurs comme des citoyens de seconde zone ». Son but? Informer le spectateur avec ce canal de diffusion qu’est le film documentaire.
Une salle de consommation à moindre risque est un espace auquel ont accès des membres, consommateurs réguliers. Elle permet de prévenir les risques. Et propose aussi une assistance sociale et administrative. Elle est gérée par du personnel qui a l’habitude de ces problématiques-infirmiers, aide-soignant, assistant social, etc …
“il y a un vrai mieux pour tout le monde”
« Ce dispositif est vu d’un bon œil par les riverains grâce à une campagne de communication et de sensibilisation. Il permet de lutter contre la consommation dans la rue, qui induit de sérieux problèmes sanitaires et sécuritaires, explique Alexandra. Autour de la salle de Liège, il y a un périmètre de sécurité où certains actes sont prohibés. Résultat : on constate un vrai mieux pour tout le monde. Grace à une surveillance policière, il n’y a ni deal ni consommation.»
Pour la réalisatrice, il est essentiel de cesser d’appeler ces dispositifs ‘salle de shoot’ : « il faut appeler les choses correctement. Salle de Shoot, c’est impropre et violent», dénonce Alexandra. Elle en est certaine, l’utilisation de ce terme péjoratif alimente l’imaginaire stéréotypé. Et justifie les politiques répressives et “stériles” que les politiciens mettent en application en France. Malheureusement, le blocage de l’ouverture de la salle de consommation à Lille traduit la pérennisation de ce cadre mental et crée un contraste avec les voisins européens.
“chasser des dragons” dans l’argot signifie la consommation d’héroïne