Association Étoile Bipolaire: mettre en lumière la bipolarité

Aujourd’hui Circonflex Mag vous fait découvrir l’association Etoile Bipolaire qui vient en aide aux personnes atteintes de troubles bipolaires. Le Docteur Michel Maron, spécialiste de la bipolarité au CHRU de Lille définit ainsi cette pathologie : « La maladie bipolaire -ou trouble bipolaire- de l’humeur est un trouble récurrent de l’humeur qui dans sa forme la plus typique, voit le patient alterner des phases de dépression avec tristesse pathologique et baisse de l’élan vital, et des phases de manie avec euphorie pathologique et agitation. » Nous avons rencontré Pascal Rolle, secrétaire de l’asso.


Circonflex Mag : Quel est le but de l’association Etoile Bipolaire ?

Pascal Rolle : Nous sommes là pour aider les personnes souffrant de troubles bipolaires et pour les accompagner, aussi bien en écoutant leurs problèmes qu’en leur donnant des pistes de soins.

 

Quels services proposez-vous dans votre association ?

Deux activités nous permettent de rencontrer les gens de manière physique. Tout d’abord, les groupes de parole. On essaie d’en faire deux à trois par mois, mais le Covid a compliqué les choses. On propose également des entretiens individuels pour les personnes qui n’osent pas entrer dans un groupe, car ce n’est pas facile de se révéler. On leur explique comment se déroulent les réunions, ce qu’est la bipolarité. On leur propose également des solutions éventuelles à leurs problèmes. On peut également correspondre par mail mais ce n’est pas évident de répondre par écrit à des personnes qui appellent au secours…

 

On est entre nous, cela permet de libérer la parole

 

Y a-t-il des critères précis pour accéder aux groupes de parole ?

La seule contrainte, pour intégrer un groupe de parole, c’est de soupçonner sa bipolarité, être diagnostiqué bipolaire, ou bien être ce qu’on appelle un accompagnant. On ne veut pas être une sorte de « zoo », avec des gens extérieurs à la maladie, qui viennent voir ce qu’est la bipolarité. Toutes les personnes qui encadrent ces groupes sont eux-même dans la maladie. Pas de psychologues, pas de professionnels de santé. On est entre nous, cela permet de libérer la parole.

 

Comment s’organisent les groupes de parole ?

On essaie toujours d’être deux : un modérateur et un co-modérateur. Les groupes de parole durent deux heures, soit à La maison des associations, soit à La maison des usagers en santé mentale. Ces réunions sont structurées en trois temps: une  présentation d’une minute, avec le prénom et le diagnostic, pour connaître la personne et sa situation. Dans un deuxième temps, chacun partage son expérience, ses problèmes. Ici on ne force personne à parler, chacun est libre de communiquer s’il le souhaite. Enfin dans un troisième temps, on va essayer de s’entraider sur les problèmes principaux qui sont ressortis lors du deuxième tour.

 

« Ça rassure de voir qu’on n’est pas seul »

 

Pensez-vous que le fait de parler de sa situation a un impact sur le bien-être mental ?

Dans un premier temps, ça rassure de voir qu’on n’est pas seul. Ensuite, le fait que l’on se voit proposer des pistes rassure aussi. Enfin, parler au sein d’un groupe notamment permet de bénéficier de l’expérience des autres. Après une  séance, on est satisfait des informations qu’on a récoltées et on peut avoir envie de recommencer. Il n’y a aucun tabou, on peut parler de tous les sujets, la parole est vraiment libre et on essaie de s’entraider.

 

Y-a-t-il des étudiants, des jeunes qui viennent à ces groupes de parole ?

Oui, bien sur. Je pense par exemple à certains jeunes, qui du fait de la surcharge de travail, ou suite à un décrochage scolaire « pètent les plombs ». C’est à ce moment là que ça se déclenche, qu’ils se rendent compte qu’il y a un problème. On travaille aussi avec la clinique Lautréamont à Loos, qui accueille des personnes qui ont jusqu’à 25 ans, il y a donc pas mal d’étudiants.

 

« Le sujet est toujours tabou et il y a beaucoup de stigmatisation.»

 

Pensez-vous que l’on parle assez de la bipolarité et autres maladies psychiatriques dans les médias, à la faculté, au sein du corps médical ? Le sujet est-il toujours tabou ?

Non, il n’en est pas assez question, et quand on en parle, on en parle mal. Ce sont presque toujours des stéréotypes qui ressortent. Le sujet est toujours tabou et il y a beaucoup de stigmatisation.

 

Est-ce que vous considérez la bipolarité comme handicapante au quotidien ?

Le propre de la bipolarité, c’est que cette maladie a un impact sur l’aspect social et professionnel. En phase maniaque (qui correspond à la phase « haute » de la bipolarité) par exemple, on peut dépenser son argent n’importe comment, conduire trop vite sur la route … mais également en arriver à un stade où on ne sait plus se comporter en entreprise, où l’on casse les liens avec son entourage.

 

Des conseils pour nos lecteurs atteints de bipolarité mais aussi pour ceux qui font face à des problèmes en période de Covid-19 avec les confinements, les cours à distance, l’isolement?

Mon premier conseil serait d’en parler avec son médecin traitant. C’est quelqu’un que l’on connaît, avec qui l’on peut avoir un temps de discussion. Suite à cette conversation il faut voir s’il est urgent de consulter un psychiatre. Il ne faut pas avoir peur, psychologiquement, de pousser la porte d’un psychiatre pour affiner son « auto-diagnostic ». Il faut se faire aider.

Il existe aussi des Centres Médicaux Psychologiques (CPM) qui représentent une aide fondamentale car pour avoir un premier rendez-vous avec un psychiatre à Lille, il faut compter trois mois. Dans les CMP, on rencontre d’abord une infirmière qui juge l’état d’urgence de la problématique et qui peut faire accélérer la rencontre avec un psychiatre. Mais déjà, juste avoir la possibilité de discuter avec ces infirmières qui ont l’habitude des troubles psychiques -et pas uniquement de la bipolarité- c’est très appréciable. De même, le fait de rencontrer des gens qui souffrent de troubles bipolaires, c’est une grande aide, c’est pour cela que l’association existe. Je finirai en vous parlant de La Maison des usagers en santé mentale qui est un lieu fondamental d’informations et de rencontres entre les gens qui souffrent de troubles psychiques. Cela permet de voir où on est en est, mais également de parler avec une personne atteinte de la même pathologie.

 

Pour plus d’informations sur l’association vous pouvez aller sur leur site internet. Et pour plus d’informations sur la bipolarité vous pouvez lire l’article de Dr Maron.

 

Chloé Portais