Bénévoles sans frontière

Depuis le 24 février, la ville de Lille a accueilli plus de 700 Ukrainiens fuyant leur pays pour échapper aux bombes russes. Le monde entier s’est montré très mobilisé et chacun tente d’aider à son échelle : dons à des associations, vivres, ou encore l’accueil de personnes dans le besoin. C’est ce qu’ont fait Hermine et son compagnon, 68 ans. Ces deux Lillois partagent la même vocation : aider les autres. Nous les avons rencontrés.

Depuis quelques semaines, et le début du conflit en Ukraine, l’Europe fait face à la vague de réfugiés la plus importante depuis la Seconde Guerre Mondiale. Le gouvernement français a mis des moyens en place pour faciliter le processus d’accueil, notamment le site web ‘parrainage réfugiés’ qui recentre toutes les actions réalisables dans le pays dans ce contexte de guerre.

Hermine s’était d’abord rapprochée de la mairie de Lille. Malheureusement, sa démarche n’a pas abouti. Elle a donc choisi de se tourner vers des associations pour tenter de proposer son aide. Elles sont très sérieuses et demandent en amont de voir le logement dans lequel vont vivre les familles, la situation des bénévoles, et restent en contact avec les réfugiés au cas où ils ne se sentiraient pas bien dans le foyer qui les accueille.

« Je fais à autrui ce que j’aimerais qu’il me fasse »

Pour Hermine et son compagnon, aucune hésitation dans les démarches, c’était évident qu’ils devaient aider. « Je pars du principe que je fais à autrui ce que j’aimerais qu’il me fasse. Je suis d’origine polonaise et je me sens plus Européenne que Française. Mon compagnon, lui, est à la Ligue des Droits de l’Homme. Donc c’était évident d’héberger des personnes. D’autant plus qu’on a les moyens de le faire. » explique-t-elle pleine d’entrain. Aider son prochain a d’ailleurs toujours rythmé sa vie. Sa carrière réalisée à Pôle Emploi ou son rôle dans des associations comme « vivre son deuil » ou « la boîte à mots » en sont la preuve.

C’est via Facebook qu’ils sont entrés en contact avec l’association, qui les a mis en relation avec une famille de 4 personnes transférée en van depuis la Pologne. Une dame de 64 ans, ses deux filles de 30 et 40 ans et son petit-fils de 4 ans. Depuis leur arrivée il y a trois semaines, ces originaires de Kiev se sont montrés ravis. Hermine explique qu’elle ne les a pas sentis traumatisés ni choqués par la guerre. Ils acceptent de sortir, profitent des sorties à la plage, des visites de Lille, et des rencontres avec d’autres ukrainiens que leur propose Hermine. « On commence à leur apprendre le français pour les choses nécessaires comme demander son chemin. Ils ne sont pas autonomes parce qu’ils ont besoin d’être rassurés par une présence, mais assez libres car ils ont chacun leur chambre et leur espace. »

« Leur vie ressemble à la nôtre »

Mais il faut maintenant penser au long terme. Les démarches légales pour tenter une quelconque émancipation sont longues : les inscriptions à la préfecture ont un délai de trois semaines. Et il faut ensuite patienter deux semaines supplémentaires pour percevoir les premiers versements de l’ADA (Allocation au Demandeur d’Asile). Ils obtiennent aussi le statut officiel de réfugié, qui leur permet de se déplacer en train ou en bus à moindre coût. « L’objectif est que leur situation soit la plus stable possible pour que celles qui sont en âge de travailler puissent le faire. » ajoute Hermine. Ils ont aussi tenté des démarches auprès du CCAS de Mons-en-Barœul pour qu’elles aient leur propre logement, les ont emmenés aux Restos du Cœur pour un accès à de l’alimentation moins chère… « On savait que ça allait nous demander du temps. On essaye de se mettre à leur place et d’aider au mieux. »

Et quand on lui demande pourquoi elle s’implique tant, Hermine évoque une similarité, une proximité avec les Ukrainiens. « C’est vrai qu’on se sent plus concernés parce que ce sont des Européens. C’est clairement ça. Leur vie ressemble à la nôtre. » Pouvoir transposer leur mode de vie, des horaires de travail, des maisons, des rues similaires,… tout cela crée inconsciemment une proximité entre les Ukrainiens et les Français.

C’est donc l’aspect humain qui ressort de cette rencontre, des destins liés et des frontières estompées. Quand on évoque le futur entre ces deux familles, Hermine espère garder un lien, mais n’en fait pas une finalité : « Ça leur appartient. Ce qui est important c’est qu’elles retrouvent leur maison et leur famille. ».