Le Yamakasi de Lille

L’exploration urbaine ou plus simplement « l’urbex » est une activité qui a pris beaucoup d’ampleur ces dernières années. Aujourd’hui, l’urbex s’est construit à travers une communauté et des règles bien précises. Baptiste Hermant, jeune passionné, parcours la France à la recherche de lieux abandonnés.


La lumière révèle les toits, le noir du ciel se transforme en un bleu foncé et enfin le soleil se montre, lentement, dévoilant la ville de Lille couverte d’une rosée du matin. Gardien d’un monde endormi, Baptiste assiste, haut perché, au spectacle d’une ville en éveil.

Outre son parcours en troisième année à l’Ecole supérieure de journalisme à Lille, la passion de Baptiste, c’est l’Urbex. Et il excelle en la matière. Depuis 2015, ses photos et vidéos circulent largement sur les réseaux sociaux et alimentent de nombreux médias.

Baptiste Hermant, c’est ce type de garçon que l’on vous dissuade de suivre, sous peine de perdre votre souffle. Galeries de métro, souterrains, hôpitaux déserts, châteaux décrépis et usines désaffectées sont les terrains de jeux de ce passionné.

 

Faire partie des premiers

 

Dès l’âge de 15 ans, Baptiste sait. Tout petit déjà, il avait une passion pour l’escalade. Il a commencé par les rochers et les arbres. En 3ème, il rencontre des gens qui partagent sa passion et se met au Parkour*. Par groupe de six, ils s’entrainent. Leur nom ? Les  Urban Climbers. Sans professeur spécialisé et sans salle,  ils se forment seuls, sur internet. « Cette pratique nous a amenés à prendre de la hauteur », raconte Baptiste. L’Urbex, alors peu connue à l’époque, le jeune homme la découvre en regardant des vidéos.

Aujourd’hui, il fait systématiquement des recherches sur l’histoire de ses lieux-cibles. Constamment équipé de son appareil photo et de son trépied, il est le premier à reconnaître qu’être explorateur urbain demande beaucoup d’heures de travail en amont. Il veut au maximum faire partie des premiers à visiter un lieu afin d’éviter la dégradation humaine -les tags par exemple. Quand Baptiste emmène des gens en urbex, il a une règle bien précise : pas de vol, pas de transmission d’adresse précise et pas de dégradation du lieu.

 

Bien sûr qu’on a peur

 

Baptiste le reconnaît, bien plus qu’un hobby, c’est un réel « déplacement de soi », qui lui permet de repousser ses limites. Il recherche l’aventure et l’adrénaline. Cet état d’esprit lui a principalement été inspiré par le champion de France de Freerun, Simon Nogueira dont il adore la mentalité et la manière d’appréhender la discipline.

Mais cette passion comporte son lot des risques. De sécurité d’abord – effondrements, pertes éventuelles…- mais aussi judiciaires. Le 11 juillet 2020 par exemple, alors qu’il escaladait le Grand Palais à Paris avec des amis urbexeurs, tout s’éclaire d’un coup. Une grande lumière blanche les aveugle et ils aperçoivent un drone, puis deux, survolant leurs têtes. Les cris des gardes et de la police les effraient. Ils  tentent de se cacher dans les recoins du toit du Grand Palais, en essayant à tout prix d’éviter les drones. Un à un, ils se font tous arrêter. Après un sévère rappel à l’ordre et une grosse amende, ils sont relâchés. « Bien sûr qu’on a peur, et heureusement, mais la peur est là pour nous faire prendre conscience du danger ».

 

 

Dans la région, il a pratiquement fait le tour des lieux désertés. Prochaine destination : l’Ukraine, et plus précisément Pripiat, une ville complétement abandonnée après l’explosion de Tchernobyl. Des arbres au milieu de la route, des mauvaises herbes dans les maisons, le tout dans un silence triomphant. La nature a repris le dessus. Pourtant, il y a un hic : même si les brigades de police y circulent nuit et jour, même si le tourisme classique y est interdit, des alternatives ont été mises en place pour permettre au grand public de découvrir cette ville fantôme. Baptiste n’a qu’une crainte : et si ces lieux finalement, étaient déjà devenus trop fréquentés ?

*Le Parkour, où l’art de se déplacer, est une discipline sportive acrobatique qui consiste à franchir des obstacles urbains –ou naturels- par des mouvements agiles et rapides, et sans l’aide de matériel. Ses adeptes sont appelés traceurs.

Allez le suivre sur Instagram

 

Baptiste Hermant en 4 dates :

21 février 2000 : naissance à Arras
7 mai 2015 : découverte du Parkour et de l’Urbex
15 juillet 2018: coupe du monde. Baptiste monte sur les toits de la place d’Arras avec des amis et commence un « clapping » au-dessus de la foule déchainée.
11 juillet 2020 : escalade du Grand Palais.

 

Eve MacGuardian