Lors de la huitième édition de la Tattoo Convention qui a fermé ses portes ce week-end, il est un stand qui n’a laissé personne indifférent. C’est celui Du Franc Curieux. Nicolas, bourguignon franc-comtois, y expose son cabinet de curiosités, résultat d’un savoir-faire qui se meure.
Nombreux sont les peaux rougies à vif, plastifiées ou en cicatrisation après le travail de gravure imperturbable des tatoueurs. Bruits répétitifs des aiguilles, perles de sueurs, froncements de sourcils… Rien de tout cela sur le stand de Nicolas. Pourtant, la plupart des visiteurs tombent comme des mouches dans les filets tendus par le Franc-Curieux. Le sourire aux lèvres, la parole facile, Nicolas emmène les néophytes à la découverte de son cabinet de curiosités, avec cette envie indéniable de transmettre sa passion pour l’entomologie, une branche de la zoologie qui s’intéresse à l’étude des insectes.
Il faut sans cesse renouveler le panel de plus de 400 arthropodes
Définition du Littré : « les cabinets de curiosité sont des pièces ou des meubles qui avaient pour but de faire découvrir le monde. Y sont entreposées des choses rares nouvelles, singulières, un mélange hétéroclite d’objets d’histoire naturelle des trois règnes -animal, minéral, végétal. » Disparu au courant du XIXème siècle, le cabinet de curiosité pourrait refaire surface dans nos intérieurs, grâce à des passionnés comme Nicolas, qui fait partie du faible effectif des entomologistes français. Cette année, il s’est invité à la Convention du tatouage, accompagné d’espèces d’insectes du monde entier : un calichroma auricomum du Mexique, un gros scarabée à ailes qui se nomme le goliathus goliatus meleagris issu de la République du Congo ou encore un cyriopagopus minax de Thaïlande. « C’est un métier qui demande une certaine rigueur et beaucoup de curiosité. Il faut sans cesse renouveler le panel de plus de 400 arthropodes – les insectes, papillons, scorpions …- mis en vente. Je m’intéresse plus au côté ornemental et à la décoration. Pour proposer un produit qualitatif, il faut se rendre sur le terrain pour étudier les différents spécimens. Je travaille avec des chasseurs du monde entier, mais aussi avec des collections anciennes », raconte-t-il.
Le cabinet Franc-curieux est magnifique. Partout, des cadres qui exposent des spécimens multicolores, figés pour l’éternité. « Je prépare les arthropodes dans mon atelier. Avant d’être montés, ils sont séchés afin d’être conservés : sous blister, les pattes repliées pour les coléoptères, en papillotes et ailes fermées pour les papillons. Afin de pouvoir les travailler, je les nettoie puis les ramollis pour leur redonner leur souplesse naturelle. Je les place ensuite sur des étaloirs, je les bloque avec des épingles, dans la position souhaitée et les laisse sécher plusieurs jours, voire plusieurs semaines. Une fois sec et retiré de l’étaloir, le spécimen est prêt à rejoindre une boîte entomologique.»
L’entomologie divise les amoureux des insectes
Force est de constater que le cabinet de curiosités de Nicolas ne laisse personne indifférent : Yeux écarquillés, regards éblouis, mais aussi mines dégoutées… les arthropodes génèrent une avalanche de réactions …et de flashs de smartphones ! Aux amateurs, Nicolas propose de composer sur place un cadre à la mesure de leurs gouts. Il laisse le choix entre des coléoptères ou bien des papillons, qu’il insère ensuite dans une boîte à la taille adaptée. Il tient à cette personnalisation qui, dit-il, ajoute un côté ludique à son cabinet. Il précise qu’il met aussi en vente des chauve-souris, des crânes d’écureuils que l’on peut retrouver sur son site web ou dans son magasin de Dijon. Et assure comprendre que l’entomologie puisse ainsi diviser les amoureux des insectes, car elle nous questionne sur un système marchand qui tire profit de l’esthétique des insectes en les dépersonnalisant aux yeux des clients.