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Paroles de vagins

À l’occasion de la semaine de la femme, l’Université de Lille 3 a présenté une relecture des Monologues du Vagin d’Eve Ensler. Mise en lecture par Coralie Miller et Marie-Astrid Périmony, c’est la 1ère fois que la pièce est jouée dans une université. On n’a donc pas pu résister d’aller voir la Première!

Pendant les 3 jours de la représentation, c’est environ 1200 spectateurs qui se sont déplacés pour voir et écouter la soixantaine de comédiennes en herbe performer cette pièce engagée, écrite en 1996. Et parmi le public, nous avons été surpris de constater à quel point tous les sexes étaient représentés. Alors comme chez Circonflex Mag, on est pour la parité, on s’est dit qu’on allait se la jouer façon un gars/une fille. Et ce sont les cousins Elise, étudiante en Physique-Chimie et Enzo, étudiant en STAPS qui ont accepté de répondre à nos questions.

Circonflex Mag : Comment avez vous connu cette pièce?

Elise et Enzo : On a entendu parler de la pièce par notre cousine Margot, qui est l’une des comédiennes.

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Elise et Enzo ont accepté de répondre à nos questions.

Quels étaient vos sentiments avant de venir à la représentation, et que ressentez vous maintenant?

Enzo : J’avoue que j’étais assez perplexe : je ne savais pas à quoi m’attendre ! Il y avait un peu de gêne, au fond, parce que c’est un sujet assez sensible et spécial. Donc, oui, une grande appréhension face au sujet, qui est tabou et très osé, je trouve. En sortant de la représentation, j’étais très agréablement surpris, notamment par les comédiennes qui ont fait une très belle performance. Et je trouve ça vraiment cool que l‘on puisse adapter une pièce avec un thème comme celui-ci, que l’on pose à plat. Il faut aller voir des pièces qui dénoncent, c’est très important.

Elise : Moi, comme Enzo, j’appréhendais un petit peu de voir la pièce : ma cousine m’avait fait lire des extraits avant et je trouvais que c’était vachement osé. J’avais un peu peur d’être gênée. Une fois la représentation terminée, j’ai trouvé que c’était sympa. Malgré certains moments un peu embarrassants, il y a surtout des moments très touchants. Cette pièce montre tous les combats que l’on peut subir avec son corps, et j’ai trouvé que c’était génial de pouvoir en parler comme ça. Aussi ouvertement et sans aucune honte.

Les femmes pensent autant à la sexualité que les hommes.

Cette pièce est un ensemble de textes, d’histoires, y en a t’il une qui vous a le plus touché?

Elise : J’avoue que l’histoire de la personne transgenre m’a vraiment touchée : il est né garçon mais il a toujours voulu être une fille et je trouve ça beau qu’à la fin, il puisse enfin être épanoui.

Enzo : Le moment qui m’a le plus marqué, c’est celui ou l’on parle des femmes qui se font violer pendant la guerre par les soldats japonais. C’est intolérable. Dans quel monde vit-on? Une autre scène m’a vraiment touché : c’est le texte de la femme fontaine. La réaction de son partenaire face à son plaisir est négative, alors elle a honte de son corps, de ses sentiments. Comme quoi l’attitude des hommes est importante lors de la sexualité, car elle peut avoir des conséquences néfastes sur leurs compagnes.

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Sur scène, 21 comédiennes en herbe interprètent les différents textes

Votre point de vue a t-il changé sur la représentation sexuelle féminine? Pourquoi parle t-on moins de la sexualité féminine que masculine, selon-vous?

Elise : Ce que j’ai surtout compris, c’est que les femmes cachent beaucoup leurs sentiments, leurs envies (notamment sexuelles). Et à travers cette pièce, j’ai eu l’impression que toutes les envies, questions, inquiétudes, joies se sont libérées. Tout d’un coup, les femmes osaient révéler ce qu’elles ressentaient vraiment. On découvre que les femmes pensent autant à la sexualité que les hommes. Pour moi, la sexualité n’est pas tabou, mais je l’avoue, je suis assez pudique vis à vis de mes sentiments.

Enzo : La sexualité n’est pas un sujet tabou chez moi, mais je n’en parlerais pas avec n’importe qui. Plus avec des potes qu’avec des copines. Je pense que si l’on parle moins de la sexualité féminine, c’est parce que c’est plus stigmatisé, souvent associé à quelque chose de négatif. Par exemple, on va y coller la notion de prostitution. Je ne sais pas pourquoi c’est comme ça. On a appris aux hommes à être ouvert sur le thème de la sexualité alors que pour les femmes, on leur a inculqué la réserve…

Il faut oser dans la vie

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Dans la salle, tous les sexes étaient représentés

Maintenant que vous l’avez vu, comment décririez-vous la pièce?

Elise : Osée, très féminine mais aussi très expressive. Comme ce sont des monologues et que sur scène il n’y a pas de déplacements, il faut tout mettre dans la voix. Et du coup, c’était super bien fait, les interprétations étaient justes, sincères et pleines de sentiments.

Enzo : Ce qui me vient en tête, c’est « atypique » mais en même temps « intéressant ». « Audacieux » aussi. Je pense vraiment que c’est le mot qui convient. Il faut oser dans la vie et ces femmes, ce soir, ont tapé du pied, fait entendre leurs paroles et dénoncé certaines choses.

Etre une femme, c’est vivre comme on veut

Comment voyez vous les femmes après cette pièce?

Enzo : Ca m’a fait remettre en question certains principes. Il faut absolument que l’on considère la femme à l’égale de l’homme, qu’elle soit mise en lumière. Qu’on libère la parole. Il faut d’avantage écouter les femmes. Et oui, j’irai de nouveau voir une pièce féministe.

Elise : Etre une femme, c’est vivre comme on veut, sans aucune retenue. Et c’est ce qu’ont fait ces femmes sur scène ce soir. Il faut arrêter de classifier les genres, de restreindre les femmes à une catégorie. Je pense par exemple à certaines professions où les femmes sont sous-représentées. Il faut arrêter de se restreindre à cause du jugement des autres. Etre une femme, c’est être fière de ce que l’on est, assumer ses choix. Etre une femme, c’est avoir du répondant et ne pas se laisser faire par les stéréotypes, les propos sexistes, misogynes, machistes. Il faut arrêter de se dire qu’il y a un sexe supérieur : on est tous égaux.

Si vous voulez voir des extraits de la représentation, c’est juste en dessous (alors comme dirait « l’orgasme nordiste » selon la pièce : Sake éddins !)

 

Chloé Devigne